La nuit des Longs Couteaux[1],[2] (allemand : Röhm-Putsch)[3], est le nom donné à l'ensemble des assassinats perpétrés par les nazis en Allemagne entre les 29 juin et 2 juillet 1934, le terme se référant plus spécifiquement à la nuit du 29 au 30 juin 1934.
Au moins 85 personnes furent tuées par des membres de la Schutzstaffel (SS) et de la Gestapo, même si le bilan final fut sans doute plus proche de la centaine de victimes, dont la majorité appartenait à la Sturmabteilung (SA)[4],[5], avec un millier de personnes arrêtées[4].
Cette purge permit au chancelier Adolf Hitler de briser définitivement toute velléité d'indépendance de la SA, débarrassant ainsi le mouvement nazi de son « aile gauche » qui souhaitait que la révolution politique soit suivie par une révolution sociale. De ce fait, elle rassura la Reichswehr, les milieux conservateurs traditionnels, les grands financiers et industriels, principalement issus de la bourgeoisie prussienne et hostiles à des réformes sociales de grande ampleur tout en créant un climat de terreur « légale » vis-à-vis de tous les opposants au régime.
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Depuis les années 1920, la Sturmabteilung (SA, section d'assaut) fonctionne comme une milice privée que Hitler utilise pour intimider ses rivaux et perturber les réunions des partis politiques concurrents, particulièrement celles des sociaux démocrates et des communistes.
Sa naissance est étroitement liée à l'atmosphère chaotique et au climat de violence politique qui entourent la naissance de la République de Weimar. De l'assassinat de Rosa Luxemburg et Karl Liebknecht, le 15 janvier 1919 lors de l'écrasement de la révolution spartakiste, à celui de Walter Rathenau, par l'Organisation Consul le 24 juin 1922, en passant par l'échec du putsch de Kapp, le 13 mars 1920, et la répression, notamment par les Freikorps, des révoltes communistes de 1920 et 1921 dans la Ruhr, en Saxe et à Hambourg, les agissements des SA, comme ceux du Stahlhelm, traduisent un climat où la violence tient lieu d'argument politique.
La montée en puissance de la SA est favorisée par la Grande Dépression[6], qui fait perdre à beaucoup d'Allemands toute confiance envers les institutions traditionnelles. La SA parvient notamment à faire adhérer de nombreux ouvriers au nazisme en associant solidarité de classe et ferveur nationaliste[7].
Les « chemises brunes » sont connues pour leur violence[8] et leur goût pour les batailles de rue[9]. Les confrontations violentes entre la SA et les opposants aux nazis, tout particulièrement la milice du KPD contribuent à déstabiliser l'expérience démocratique de l'entre-deux-guerres de la République de Weimar, ce qui est précisément le but d'Hitler[10].
La SA est dirigée par Ernst Röhm, vétéran prestigieux de la Première Guerre mondiale, membre de l'État-Major de la Reichswehr en Bavière, nazi de la première heure et participant du Putsch de la brasserie[11]. Il veut maintenir une indépendance de la SA par rapport au parti nazi et lui faire jouer son propre rôle politique. Comme beaucoup de SA, Röhm prend au sérieux la promesse de révolution sociale du NSDAP. Pour eux, l'accession au pouvoir des nazis doit être suivie par des mesures économiques et sociales radicales.
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Le 30 janvier 1933, le président Paul von Hindenburg nomme Adolf Hitler chancelier. Dès le 14 juillet 1933, le parti nazi devient le seul parti politique autorisé. Cependant, en dépit de la consolidation rapide de son autorité politique, Hitler ne dispose pas encore d'un pouvoir absolu. Il n'a notamment pas autorité sur la Reichswehr qui dépend de Hindenburg, président et commandant en chef des armées. Si de nombreux officiers sont séduits par les promesses d'Hitler de doter l'Allemagne d'une armée plus nombreuse, malgré les limitations imposées par le traité de Versailles, de réinstaurer la conscription, et de mener une politique étrangère plus agressive, l'armée garde une réelle indépendance.
Paul von HindenburgLa nomination d'Hitler comme chancelier ne met pas fin aux exactions de la Sturmabteilung. Les SA, imprégnés d'une culture de la violence, continuent à pourchasser les opposants réels ou supposés. Sous l'emprise de la boisson, ils écument les rues allemandes, battant des passants et attaquant les policiers envoyés pour les arrêter[12]. À Berlin, la SA ouvre une cinquantaine de « microcamps de concentration », installés dans des caves ou des dépôts où leurs victimes sont battues à mort, torturées ou égorgées[13]. Les plaintes concernant le comportement des SA deviennent fréquentes à l'été 1933. Le premier chef de la Gestapo, Rudolf Diels, déclare après la guerre, à propos des prisons berlinoises de la SA : « Les interrogatoires avaient commencé et fini par un passage à tabac. À quelques heures d'intervalle, une douzaine de gars avaient frappé leurs victimes avec des barres de fer, des matraques en caoutchouc et des fouets. Dents brisées et os cassés témoignaient des tortures. À notre entrée, ces squelettes vivants couverts de plaies suppurantes étaient allongés les uns à côté des autres sur leur paillasse putréfiée »[14]. Le ministère des affaires étrangères se plaint des agressions des chemises brunes envers les diplomates étrangers[15]. Un tel comportement dérange les classes moyennes, les éléments conservateurs traditionnels et l'armée. Il suscite aussi des protestations des milieux de l'industrie, du commerce, des administrations locales, et de l'Église protestante[16]. Le ministre de l'intérieur lui-même, Wilhelm Frick, estime que « les actes répréhensibles commis par des membres de la SA devront faire l'objet de poursuites énergiques »[17].
Le soutien des responsables militaires est crucial pour permettre à Hitler de mener à bien ses projets, notamment la conquête d'un Lebensraum, déjà annoncé dans Mein Kampf, ou l'Anschluss qu'il souhaite depuis toujours. Il est aussi fondamental dans la perspective de la succession de Paul von Hindenburg, âgé et de santé fragile[18]. Le 6 juillet 1933, lors d'une réunion à la chancellerie avec les gouverneurs du Reich, il proclame à la fois le succès et la fin de la révolution nationale-socialiste. Selon lui, comme le parti nazi a saisi les rênes du pouvoir, le temps est venu de le consolider : « La révolution ne saurait être un état permanent. Il faut diriger le torrent de la révolution dans le lit tranquille de l'évolution. [...] Il faut surtout maintenir l'ordre dans l'appareil économique [...] car l'économie est un organisme vivant que l'on ne peut transformer d'un seul coup »[19]. Il précise sa pensée lors d'un discours à Leipzig, dix jours plus tard : « Les révolutions ayant réussi au départ sont beaucoup plus nombreuses que les révolutions, qui, une fois réussies, ont pu être contenues et stoppées au moment opportun »[20].
Les propos d'Hitler et la prudence du régime en matière de réformes sociales et économiques radicales déçoivent la majorité des SA qui attendait une révolution économique aussi bien que politique[21]. Hitler manifeste donc son intention de limiter peu à peu le pouvoir de la SA, dont le nombre de membres a rapidement augmenté depuis le début des années 1930. À son instigation, Hermann Göring, alors ministre de l'Intérieur pour la Prusse, ôte à la SA son rôle de police auxiliaire en Prusse dans le courant de l'été 1933, puis transfère le contrôle des camps de concentration à la SS en octobre
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Après le discours de Marbourg et l'entrevue avec Hindenburg et Blomberg à Neudeck, Hitler met fin à ses tergiversations et prend la décision de détruire le pouvoir de Röhm. Himmler et Göring accueillent cette nouvelle attitude du Führer avec satisfaction, espérant pour le premier débarrasser la Schutzstaffel de la tutelle de la SA et assurer son indépendance, et pour le second, la mise à l'écart d'un rival pour le commandement de l'armée. Le 27 juin 1934, Sepp Dietrich se fait délivrer des armes par le ministère de la défense en vue « d'une mission très importante confiée à ses soins par le Führer »[54].
En vue de la purge, Himmler et son adjoint direct, Reinhard Heydrich, chef du service de sécurité SS, fabriquent un dossier de fausses preuves prétendant que Röhm avait été payé douze millions de marks par la France pour renverser Hitler. Les principaux dirigeants de la SS découvrent ce dossier monté de toutes pièces le 24 juin, ce qui fonde l'accusation contre Röhm suspecté de fomenter un complot contre le gouvernement (le Röhm-Putsch)[55]. Tout en préparant l'épuration de la SA et en dressant la liste de ses responsables à éliminer, sous l'impulsion de Heydrich, le SD, la SS et la Gestapo élargissent la liste des futures victimes sans lien avec la SA[56]. Les listes circulent entre la Gestapo et les services de Göring, qui en retire Rudolf Diels[57].L'un des rédacteurs de ces listes de proscription, Ilges, SD-Obersturmführer, tient les propos suivants : « Vous savez ce que c'est d'être ivre de sang ? J'ai l'impression d'avoir le droit de patauger dans le sang »[58] D'après Friedrich Karl von Ebertsein, proche de Heydrich, la liste des victimes envoyée de Berlin au SD de Dresde est signée par Heydrich lui-même. Le 27 juin, Hitler obtient la coopération de l'armée[59] : Blomberg et le général Walther von Reichenau, l'intermédiaire entre l'armée et le parti, font expulser Röhm de la ligue des officiers allemands et placent l'armée en alerte[60]. Les généraux von Kleist et Gotthard Heinrici, qui ont mené leur propre enquête sur la réalité du projet de coup d'État et qui sont convaincus de l'inexistence de celui-ci prennent contact avec le général von Fritsch. Lors d'une entrevue avec von Reichenau, von Fritsch et von Kleist reçoivent comme toute réponse : « C'est bien possible, mais de toute façon, il est trop tard »[61].
Le 28 juin, Hitler se rend, en compagnie de Göring au mariage du gauleiter Josef Terboven, à Essen en Westphalie, pour des raisons qui restent controversées[62]. Il y retrouve notamment Viktor Lutze, qui a le sentiment « que certaines gens avaient intérêt à profiter de l'absence de Hitler pour accélérer le train de l'affaire et parvenir à une conclusion rapide »[63]. Hitler quitte la noce assez tôt pour rejoindre son hôtel d'où il s'entretient par téléphone avec l'adjudant-major de Röhm à Bad Wiessee et demande aux dirigeants de la SA de venir le rencontrer le 30 juin[64]. Le 29 juin, en début d'après-midi, il arrive à l'hôtel Dreesen, à Bad Godesberg dans le cadre de ses visites d'inspection aux camps du service allemand du travail.[65].
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Le 29 juin, Göring met en alerte l'unité de gardes du corps d'Hitler, qui deviendra la 1re division SS Leibstandarte Adolf Hitler et la Landspolizeigruppe General Göring, troupe de police lourdement armée qui sera transformée au cours de la guerre en 1re division Fallschirm-Panzer Hermann Göring ; il donne également des instructions de mobilisation des commandos de tueurs à Reinhard Heydrich et Heinrich Müller ; Sepp Dietrich et ses hommes s'envolent pour Munich[66]. À son arrivée dans la capitale bavaroise, vers minuit, Dietrich téléphone au Führer qui lui donne l'instruction de marcher sur Bad Wiessee[67]. Peu de temps après, c'est Himmler qui appelle Hitler de Berlin, pour lui annoncer que le putsch de la SA doit se déclencher à 16 heures, sous le commandement du SA Grüppenführer Karl Ernst[67]. Goebbels, qui est aux côtés de Hitler et qui sait qu' Ernst, loin de préparer un putsch, est prêt à s'embarquer pour Ténériffe et Madère, en voyage de noces, ne dément pas l'information[67]. Le 30 juin 1934, à deux heures du matin, Hitler et son entourage prennent l'avion pour Munich à l'aéroport de Bonn-Hangelar[68]. De l'aéroport de Munich, ils se rendent au ministère de l'intérieur de Bavière, où sont rassemblés les responsables d'une émeute de la SA qui avait eu lieu dans des rues de ville la nuit précédente. L'incident a manifestement été gonflé et exploité : si des slogans hostiles au Führer et à la Reichswehr ont effectivement été lancés, des officiers de la SA ont exhorté leurs hommes à retrouver leur calme : « Rentrez tranquillement chez vous et attendez la décision du Führer. Quoi qu'il arrive, qu'Adolf Hitler nous congédie, qu'il nous autorise à porter cet uniforme ou qu'il nous l'interdise, nous restons avec lui, derrière lui »[69]. Furieux, Hitler arrache les épaulettes de Gruppenführer SA de la vareuse de Schmid, le chef de la police de Munich, pour ne pas avoir réussi à maintenir l'ordre. Hitler le menace d'être exécuté et le fait immédiatement incarcérer à la prison de Munich-Stadelheim[70]. Pendant que les chemises brunes sont transférées en prison, Hitler rassemble un groupe de SS accompagnés de la police régulière puis se dirige vers l'hôtel Hanselbauer à Bad Wiessee, où se trouvent Ernst Röhm et ses hommes[71].
Le lac de Tergernsee qui borde Bad Wiessee.Sans attendre les troupes de Dietrich[72], à 6 h 30, Hitler arrive à la pension Hanselbauer à Bad Wiessee. Pistolet au poing, il entre en trombe dans la chambre de Röhm, le traite de traître et le déclare en état d'arrestation[72]. Hitler, le pistolet toujours au poing, poursuit sa course et cogne contre la porte d'une chambre voisine[73] : il y découvre le chef de la SA de Breslau, Edmund Heines, qui a manifestement passé la nuit avec un membre de la SA de 18 ans[74]. Pendant que les deux hommes sont arrêtés, Hitler frappe déjà à d'autres portes[73],[75]. Les dirigeants de la SA sont enfermés dans la cave de l'hôtel en attendant l'arrivée du bus qui doit les conduire à la prison de Stadelheim[72]. Un incident est évité de justesse lorsque Hitler, sortant de l'hôtel, se retrouve face à la garde de l'état-major de Röhm, fortement armée, à qui il ordonne de regagner Munich sur le champ[73]. Pendant ce temps, les SS arrêtent un certain nombre de chefs de la SA au moment où ils descendent du train en gare de Munich pour rejoindre Röhm[76] ou lorsque la voiture qui les conduit à Bad Wiesee croise le convoi qui emmène les prisonniers vers Stadelheim[77].
Le fait que le complot de Röhm soit une totale invention n'empêche pas Hitler d'en faire porter la responsabilité sur le commandement de la SA[78]. Rentrant vers midi au quartier-général du parti nazi à Munich, la « maison brune », Hitler s'adresse aux cinquante à soixante responsables de la SA qui y sont rassemblés[79]. « Fou de rage et l'écume à la bouche »[72], il dénonce « la plus grosse trahison dans l'histoire du monde »[72]. Dans son discours d'une heure, Hitler fustige le comportement de Röhm, notamment son train de vie fastueux, insiste sur la nécessité de délimiter avec précision le rôle et les missions de la Reichswehr et de la SA, en renouvelant sa confiance à celle-ci et termine en dénonçant le complot de Röhm qui avait pour but de l'assassiner et de livrer l'Allemagne à ses ennemis[79].
Heinrich Himmler et Rudolf Heß à Dachau en 1936Dans l'après-midi, alors que les assassinats de Herbert von Bose, Erich Klausener et Kurt von Schleicher ont déjà été commis, Hitler convoque une réunion, toujours à la « maison brune » pour décider du sort de la trentaine de chefs de la SA emprisonnés à Stadelheim : y participent notamment Rudolf Hess, Martin Bormann, Goebbels, Max Amann, le responsable de la presse du parti et d'autres personnalités de second rang[80]. Après des débats animés, Hitler coche six noms de personnes à exécuter sur la liste des détenus : August Schneidhuber, Obergruppenführer SA et préfet de police de Munich, Wilhem Schmid, Gruppenführer SA à Munich, Hans Peter von Heydebreck, Gruppenführer SA à Stettin, Hans Hayn, Gruppenführer SA à Dresde, le comte Hans Joachim von Spreti-Weilbach, Standartenführer SA à Munich et Edmund Heines, SA-Obergruppenführer[81]. Par contre Hans-Karl Koch est déclaré innocent, Fritz von Krausser, SA-Obergruppenführer est grâcié en raison de son brillant passé militaire et de sa participation au Putsch de la brasserie, de même que Röhm dont le Führer refuse l'exécution[80]. Hess, présent dans l'assemblée, se porte volontaire pour exécuter les « traîtres » lui-même[76]. Goebbels, qui a accompagné Hitler à Bad Wiessee, déclenche la phase finale du plan : il téléphone à Göring, donnant le mot de code Kolibri pour déclencher l'action des escouades de tueurs dans le reste de l'Allemagne[78].
« Accomplir son devoir et aligner au mur les camarades qui avaient fauté et les fusiller [...] chacun en frémissait, et, pourtant, chacun savait avec certitude qu'il le referait la prochaine fois qu'on lui ordonnerait et quand ce serait nécessaire »
— Heinrich Himmler, 1943[82].
En fin d'après-midi, vers dix-huit heures, lorsque Dietrich[83] et ses tueurs se présentent à la prison de Stadelheim, son directeur, Koch, proteste en estimant qu'un simple coup de crayon rouge sur une liste de noms ne lui paraît pas « très règlementaire » comme ordre d'exécution[84]. Il prend contact avec le Ministère de l'Intérieur, puis il est contacté par le ministre lui-même, Hans Frank, tenu à l'écart des événements et qui lui annonce qu'il vient sur le champ[85]. Dietrich, quant à lui, ne veut pas attendre l'arrivée de Frank pour procéder aux exécutions. Il retourne à la « maison brune » quasi déserte, où il obtient une confirmation de la liste des personnes à exécuter via la signature de celle-ci par le Ministre de l'Intérieur de Bavière, Adolf Wagner[85]. Pendant ce temps, Frank, arrivé sur place a également obtenu confirmation de l'ordre du Führer au cours d'un entretien téléphonique avec Hess[85].
Les prisonniers sont amenés dans la cour de la prison et fusillés un par un par un peloton d'exécution sous les ordres de Sepp Dietrich, qui ne commande personnellement que les deux premières exécutions[86]. Selon Jacques Delarue Schneidhuber supplie Dietrich en vain, s'écriant « Camarade Sepp, qu'est-ce qui se passe ? Nous sommes innocents ! »[87]. Pour Jean Phillipon, après des protestations à l'annonce de la décision du Führer, les condamnés meurent en s'écriant « Je meurs pour l'Allemagne : Heil Hitler! »[88].
Des exécutions ont également lieu à Berlin, dont celles de Karl Ernst, chef de la SA de Berlin-Brandebourg, arrêté à Brême la veille de son embarquement pour une croisière dans l'Atlantique sud[89], qui crie au peloton : « Visez juste, camarades ! »[90]. En Silésie, le chef SS Udo von Woyrsch[91] perd le contrôle de ses hommes[92]: ceux-ci traquent Werner Engels, SA-Sturbannführer et responsable de la police de Breslau dans les bois et l'abattent ; un des membres du commando tue un ancien SS-Stabsführer, exclu pour malversations financières et dont l'exécution est maladroitement maquillée en un crime commis par des rodeurs[93]. L'action de la SS en Silésie est particulièrement violente et outrepasse les ordres d'Himmler : quatorze membres de la SA sont exécutés, dont sept sont fusillés un par un dans les bois d'Obernigk à la lueur des phares des véhicules, huit civils, dont un médecin juif et trois communistes, sont assassinés, des centaines d'opposants au régime ou tièdes à son égard sont emprisonnés ou passés à tabac[93]...En Prusse orientale, Erich von dem Bach-Zelewski, fait abattre, sur ordre d'Heydrich, Anton von Hohberg und Buchwald, cavalier exceptionnel et SS-Reiteführer, qui avait rapporté au ministère de la défense des propos hostiles à la Reichswehr tenus par un SS-Gruppenfürer[94]. La répression sévit aussi en Poméranie : le SA-Gruppenführer Peter von Heydebreck et son chef d'État-major sont passés par les armes, tous les SA-Brigadeführer sont destitués, les responsables locaux du Stahlhelm sont emprisonnés et parfois torturés ; trois anciens membres de la SS, condamnés pour leurs exactions dans le camp de concentration de Bredow, près de Stettin sont également assassinés[94].
La mort de Röhm est suivie d'une nouvelle série d'exécutions à Berlin : l' Obergruppenführer SA Falkenhausen, le Gruppenführer von Detten, Ritter von Krausser, précédemment gracié par Hitler[95]. La dernière victime désignée, le Gruppenführer SA Karl Schreyer est embarqué dans une voiture pour être fusillé à la prison de Lichtervelde, à 4 heures du matin, le 2 juillet[95] : il est sauvé par l'arrivée d'un Standartenführer de la Leibstandarte qui transmet l'ordre d'Hitler d'arrêter les exécutions[95
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