..d'habitude je suis tellement frustree, je me reproche aussi mon meprix que je ressens souvent pour mon pays...mais cette fois je suis si fiere et joyeuse de vous partager ....yessss
Le jury du Prix des cinq continents de la francophonie a désigné la Roumaine Liliana Lazar comme lauréate 2010 pour son premier roman, Terre des affranchis (Gaia, 2009), qu’il considère comme « un conte cruel, politique et métaphysique où, dans la lutte entre le bien et le mal, devant la brutalité des faits, il n’y a pas de rédemption ».
Abdou Diouf, secrétaire général de la francophonie, remettra le prix le vendredi 22 octobre à Montreux (Suisse), en marge du 13e sommet des chefs d’État et de gouvernement de la francophonie.
Liliana Lazar, née en 1972, situe l’action de Terre des affranchis avant et après la dictature de Ceausescu, au sud de la Roumanie, où la famille Luca vit recluse à la lisière du village de Slobozia. Le fils Victor commet un crime et va devoir vivre caché de longues années. Son besoin de rédemption l'amènera à accepter une mission secrète : être copiste afin de sauver les écrits des saints, interdits sous le régime communiste.
Créé par l’organisation internationale de la francophonie, le prix des cinq continents met en lumière chaque année des talents littéraires reflétant l’expression de la diversité culturelle et éditoriale en langue française sur les cinq continents. Il consacre un roman d’un écrivain témoignant d’une expérience culturelle spécifique, enrichissant l’expression de la langue française. Le Prix est doté d’un montant de 10 000 euros et l’OIF assure la promotion du lauréat sur la scène littéraire internationale.
Liliana Lazar a été désignée parmi dix finalistes par un jury international présidé par Lyonel Trouillot et composé de Lise Bissonnette (Canada-Québec), Monique Ilboudo (Burkina Faso), Paula Jacques (France-Égypte), Vénus Khoury-Ghata (Liban), Pascale Kramer (Suisse), Jean-Marie Gustave Le Clézio (Maurice), Henri-Lopes (Congo), René de Obaldia (Hong Kong), Leïla Sebbar (France-Algérie) et Kossi Efoui, lauréat du prix 2009, qui siègeait pour cette session.
http://www.livreshebdo.fr/prix/actualit ... /5186.aspxUn conte crépusculaire tissé des turpitudes d'un petit village sous l'ère Ceausescu.
4
Il y a du Bram Stoker et du Barbey d'Aurevilly chez cette nouvelle romancière de 36 ans, originaire de Roumanie, qui a choisi la langue française pour sonder les bas-fonds de son village natal, en bordure de forêt, perforé par un lac aux eaux voraces et phosphorescentes. Liliana Lazar signe un premier roman inquiétant, plein de trouées de lumière et de zones d'ombre, autour d'une créature à la Frankenstein de 100 kilos, alias le Bœuf muet, bûcheron dont les mains tuent quand elles croient étreindre. Caché sous les toits de sa mère pour échapper à la police, il tente de se racheter une bonne conduite en se faisant moine copiste. Ses battoirs lâchent la hache pour la plume et couvrent des cahiers entiers de textes religieux que Ceausescu a interdits. Cet acte de résistance n'étouffe pas les pulsions meurtrières du colosse, dont l'ambivalence donne un aspect délicieusement bancal au livre.
« Tiens ton esprit en enfer, et ne désespère pas ! » : tel est le verset mystérieux qui scande les écrits saints que l'assassin couche sur le papier. A Slobozia, comme dans tout le pays, chacun semble avoir fait sien ce précepte machiavélique. Toujours sur le point de basculer, rongés par la schizophrénie du totalitarisme, les habitants boitillent et convulsent, dans un ballet aveuglant de fin du monde. Sur cette terre des Carpates, où les ragondins broutent les mandragores et les saules forment des tunnels sans fin, tout est incertain, insaisissable. L'existence est une messe noire que Liliana Lazar dépeint par petites touches simples et solaires, dangereusement champêtres, comme dans un tableau d'art naïf. La mort se veut spectaculaire, rageuse : par torture, par assassinat, par amour, et même par acte cérébral, dans un bouleversant passage du livre, où la mère du meurtrier se couche les bras en croix et pense à l'au-delà jusqu'à ce que sa dernière heure arrive. Envoûtant et engagé, courant de 1970 à 1989, Terre des affranchis est un conte politique sur l'insoutenable tranquillité de l'être. Si l'après-Ceausescu ne donne lieu qu'à des retournements de veste, ce ne sont pas des épouvantails qui les portent, mais des êtres fragiles et perdus, dont Liliana Lazar chante la noblesse d'une belle voix cristalline.
Marine Landrot
http://www.telerama.fr/livres/liliana-l ... ,46063.php