Nous avons vu cette attitude à l'oeuvre, quand une chroniqueur du Globe and Mail, a accusé le Québec de racisme et a imputé la tuerie de Dawson à notre défense du français. Une telle attaque, aussi mesquine, envers n'importe quel autre groupe aurait fait l'objet d'une condamnation sans équivoque dans les médias canadiens. Mais pratiquement personne n'a protesté au Canada anglais contre cette chronique ignoble, car s'attaquer ainsi au Québec, c'est permis.
Tous les jours à la Chambre des communes, des députés du Canada anglais, qui ne parlent souvent pas un seul mot de français, qui ne connaissent rien au Québec, multiplient les insinuations, laissant entendre que nous serions moins honnêtes et que, de toute façon, chacune des demandes du Québec se résume à du quémandage.
En s'attaquant au Québec avec sa Une coup de poing, en généralisant les agissements de quelques uns à tous les Québécois, le Maclean's ternit injustement l'image du Québec, de la Ville de Québec et des Québécois eux-mêmes. En fait, le magazine ne fait que renforcer les préjugés tenaces du Canada envers le Québec. Pourtant, n'est-ce pas en Colombie-Britannique que plusieurs premiers ministres ont fait l'objet d'enquêtes policières sur la corruption? Le scandale des commandites, à ce qu'il nous semble, était bel et bien téléguidé à partir d'Ottawa. De même, Option Canada, un autre scandale, était lui aussi téléguidé d'Ottawa. Combien de ministres du gouvernement Mulroney ont démissionné à la suite d'un scandale ou d'allégations de corruption?
Le premier scandale politique au Canada, ce fut celui impliquant Johnny Macdonald lui-même, le premier premier ministre de l'histoire canadienne, qui figure sur les billets de 10 dollars. Il fut contraint de démissionner, à la suite du scandale du Pacifique. Doit-on pour autant généraliser et affirmer que le Canada est un pays corrompu, qui célèbre la gloire de politiciens corrompus sur ses billets de banques? Bien sûr que non, ce serait malhonnête.
En ce moment et il n'est pas inutile de rappeler les scandales dont on parle tournaient autour du Parti libéral du Canada dans le cas des commandites et du Parti libéral du Québec, dans le cas de la construction. Si ces scandales ont éclaté, c'est parce que les journalistes québécois, comme l'immense majorité de la population, n'acceptent pas de telles pratiques.
Les Québécois sont très majoritairement en faveur d'une enquête publique sur ces pratiques, ils veulent que le ménage soit fait, mais ils se heurtent au refus du gouvernement libéral. Doit-on jeter l'opprobre sur l'ensemble des Québécois du fait des agissements d'une clique politique? Puisque ces scandales sont l'affaire des partis fédéralistes, devraient-on généraliser et insinuer que tous les fédéralistes sont corrompus? Bien sûr que non. Il existe des milliers de Québécois fédéralistes qui sont parfaitement honnêtes.
Alors, si le Maclean's fait sa une en représentant le Québec en entier comme un endroit corrompu, devrions-nous en déduire que le Canada en entier est xénophobe, quand il s'agit du Québec, et seulement quand il s'agit du Québec?
Il est vrai que ce sentiment est trop répandu au Canada, mais jamais au point de le généraliser à toute une population.
Gilles Duceppe
Chef du Bloc Québécois

http://www.cyberpresse.ca/le-soleil/opi ... phobes.php